« Un impact incertain », tel est le scénario envisagé pour le secteur immobilier en Europe en 2021 dans le rapport Emerging Trends in Real Estate par Urban Land Institute, la plus importante organisation immobilière indépendante à but non lucratif, point de référence pour les communautés immobilières.
Tous conviennent que le Covid-19 n’apportera pas de nouvelles importantes dans le secteur de l’immobilier, mais il changera certainement notre façon de vivre et de travailler. Il le fera en accélérant les tendances de ces dernières années qui, toutefois, seront affectées par le spectre de nouvelles vagues pandémiques.
En tout état de cause, l’immobilier reste l’une des rares classes d’actifs qui peuvent encore générer des rendements acceptables en période de taux d’intérêt bas ou négatifs. C’est pourquoi, en raison de l’instabilité économique, on s’attend à ce que les investisseurs institutionnels s’intéressent particulièrement à l’immobilier core, comme ce fut le cas après la crise de 2008.
La pandémie posera également des défis immédiats aux secteurs des bureaux et du commerce de détail, accélérant les tendances actuelles à long terme dans un monde où il faut s’attendre à « plus de travail à distance » et « plus d’achats en ligne« .
La sécurité des rendements des biens immobiliers sera cruciale pour les investisseurs. Afin de contenir l’apparition de situations d’arriérés, ces derniers seront de plus en plus attentifs à évaluer non seulement la qualité du locataire, mais aussi les risques éventuels liés à l’activité exercée par ce dernier à l’intérieur de l’immeuble. Par conséquent, bien qu’il soit encore trop tôt pour évaluer l’impact possible sur les prix, on a tendance à considérer de plus en plus les biens immobiliers comme un « service » et/ou comme une véritable classe d’actifs opérationnelle.
Dans ce contexte, il faut s’attendre à ce que les décisions des investisseurs immobiliers en 2021 soient prises avec prudence. Des décisions qui seront également influencées par les situations géopolitiques liées à Brexit, les élections présidentielles américaines et les différends commerciaux.
S’il est vrai que le secteur immobilier en Europe se trouve dans un cycle d’équilibre substantiel entre l’offre et la demande, les politiques plus ou moins rapides et efficaces lancées par les gouvernements nationaux sur la pandémie auront également un impact, à court ou à long terme, au niveau des transactions immobilières et des valeurs.
Lieux et secteurs où investir
De ce point de vue, l’Allemagne, « back in action » grâce à la manière efficace dont elle a fait face à la pandémie, s’affirme comme un « refuge » pour les investisseurs immobiliers. Berlin, qui a battu le record de Paris de 2020, est en tête. Toutefois, le marché continuera à avoir confiance en Londres et Paris, notamment pour la liquidité que ces villes sont en mesure de fournir aux investisseurs à long terme.
En outre, le secteur commence à voir positivement, dans le monde post-Covid et en raison de la délocalisation prévisible de nombreuses entreprises, même les villes petites et moyennes, mais seulement celles qui sont en mesure de garantir d’excellentes connexions et transports.
Les entreprises utiliseront de plus en plus la technologie dans leurs activités quotidiennes. C’est pourquoi les centres de données et la logistique sont les classes d’actifs qui bénéficieront le plus des effets de la pandémie, principalement en raison de la numérisation croissante et imparable dans toute l’Europe, qui sera renforcée au cours des derniers mois de 2020.
Cependant, le résidentiel à revenu reste toujours un « evergreen », grâce à la sécurité traditionnelle de ses rendements.
Pour finir, l’immobilier semble avoir enfin compris son rôle fondamental au sein de la société. Des questions telles que la diversité, l’inclusion dans les lieux de travail et la protection de l’environnement sont abordées au profit d’investissements stratégiques de plus en plus « systémiques » et orientés vers les politiques ESG (Environmental, Social and Governance) par rapport aux fonds classiques et aux produits spécialisés du passé.
Les nouvelles très récentes sur le vaccin anti-Covid et une confiance renouvelée dans les perspectives futures, comme le confirme également la performance positive des marchés boursiers, pourraient également modifier de manière significative les prévisions contenues dans le rapport de l’ULI.
Real Estate Capital Markets
En raison des restrictions de voyage dues au Covid-19, on prévoit à court terme une croissance des investisseurs nationaux par rapport aux investisseurs internationaux. Dans ce dernier cas, il y aura une prédominance des capitaux asiatiques par rapport à ceux de l’Amérique du Nord et du Canada.
Les villes ayant les marchés les plus actifs entre le dernier trimestre 2019 et le troisième trimestre 2020 sont les suivantes, avec Londres en tête (2 billions €), Paris en deuxième position (13 billions €), Milan en septième position avec un total de 4 billions €.
Les classes d’actifs à miser
Favorisés par la croissance de la numérisation globale déclenchée par Covid-19, les centres de données, la logistique et les life sciences sont les 3 segments prospect sur lesquels il faut se concentrer, alors qu’on s’attend, à court terme seulement, à un ralentissement dans certaines classes d’actifs qui ont connu une croissance importante ces dernières années comme le student housing, l’hôtellerie et le co-living, qui ont été fortement affectés par les blocages dus à la pandémie.
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Les bureaux, dont la valeur n’a pas encore été réduite, restent une classe d’actifs dans laquelle il conviendra d’investir à l’avenir aussi. Cependant, ils devront être repensés (espace, qualité de l’air, etc.) pour rester dans la course. En tout état de cause, il est de l’avis général que les Headquarters resteront indispensables pour cultiver les talents et créer une culture d’entreprise.
Pour le retail, il faut s’attendre à une réduction des frais et des prix, notamment dans les centres commerciaux.
Les marchés à surveiller
Malgré les blocages dus à la pandémie, l’effondrement des économies et un futur incertain, le classement des villes les plus dynamiques sur le marché n’a pas beaucoup changé par rapport à l’année dernière.
Dans le top 10, Berlin prend la tête tandis que la reine de 2020, Paris, tombe à la troisième place. La capitale de l’Allemagne est la ville que tout le monde veut, surtout le segment des bureaux qui voit ses loyers augmenter. Les trois autres avant-postes allemands – Francfort (4), Hambourg (6) et Munich (7) – se classent parmi les dix premières villes européennes. Ils sont favorisés par des prévisions optimistes sur l’économie allemande.Médaille d’argent pour Londres qui, avec Paris, maintient toujours un nombre élevé de supporters.
La valeur des investissements à Madrid, qui a enregistré de bien meilleurs résultats l’année dernière, perd du terrain. Ce n’est toutefois pas surprenant, car l’Espagne et le Portugal dépendent fortement du tourisme. L’absence de flux migratoires en 2020 a eu un impact majeur sur leur économie. Ce n’est pas un hasard si Barcelone et Lisbonne (9 et 10 en 2020) sont tombées respectivement aux 13e et 15e rangs.
Focus France
En particulier, Paris est sur la liste des souhaits de tous les investisseurs, surtout pour la logistique, les logements et les bureaux. Le projet d’infrastructure du « Grand Paris », un fleuron de 26 milliards d’euros, et les Jeux olympiques de 2024 sont souvent considérés comme un plus de la Ville Lumière. Une plus grande prudence sur La Défense, actuellement caractérisée par une offre excédentaire.
Les perspectives pour Lyon (21), deuxième ville la plus attrayante de France, tout comme Manchester, Birmingham et Édimbourg, n’ont pas changé depuis 2020. Cela est dû en partie à la taille/liquidité plus petite de ces villes, dont les critères de classification tiennent dûment compte.
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Focus Italie
De manière surprenante, Milan revient dans le top 10, à la septième place, récupérant 5 places par rapport à l’année dernière. Rome lutte toujours pour attirer la confiance des investisseurs, se plaçant au 23e rang. Cependant, nombreux sont ceux qui pensent que Rome est la « nouvelle » ville dans laquelle investir, désormais au point le plus bas du cycle économique et social.
Il est curieux de constater la différente perception des investisseurs vis-à-vis des deux principales villes d’Italie. Milan, dont les rendements dans le segment des bureaux sont aussi faibles que ceux des principales villes allemandes, est considérée comme une ville « nordique ». Situé en Lombardie, l’une des régions les plus riches et les plus peuplées d’Italie, il constitue une cible privilégiée pour les opérateurs logistiques. Malheureusement, on ne peut pas en dire autant de la Capitale.
Focus Luxembourg
Luxembourg se situe en milieu de classement, à la 17e place, ce qui est intéressant surtout dans le secteur des bureaux, dont les prix ne cessent d’augmenter.